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  • Daniel Charneux

Le jogging du cœur comme si vous y étiez


Je me souviens que l’OBJ, né au début des années 80, avait organisé (en 84 ou 85 ?) un marathon auquel avaient participé Bruno et Didier Cougneau. Le marathon avait ensuite été remplacé par un 14 kilomètres disputé d’abord au printemps, puis en automne. Je me souviens que, lors de la première édition de cette course, Jacky Bource, battu par Bruno Strappazzon, avait protesté car il estimait avoir été la victime d’un signaleur peu précis (l’arrivée s’était jouée au coude à coude).

Je me souviens que la première édition à laquelle j’ai participé se déroulait le dimanche 17 novembre 85 (je triche, j’ai mon carnet), et que j’ai terminé 4e sur 96, en 51’06. Le parcours annonçait 14 km 600.

Je me souviens que j’ai remporté l’édition 86 en 49’37. La distance était celle des éditions ultérieures : 14 km 380. Il y avait 136 coureurs à l’arrivée, et je crois que le deuxième était Michel Liemans, de l’U.S. Maubeuge. Je portais un short rouge et un singlet en filet « Ligne 7 » avec une bande horizontale rouge et une noire. J’avais des cheveux et le dossard 19 (je triche encore, cette fois grâce à mon album photo). Je me souviens que j’avais considéré cette course comme une promenade de santé. J’aimerais bien encore pouvoir me balader à moins de 3’30 au kilomètre…

Je me souviens que j’ai été rudement bien inspiré d’inscrire cette année-là mon nom au palmarès car ensuite, c’est devenu beaucoup plus difficile. Je me souviens de quelques vainqueurs prestigieux comme Emiel Puttemans, Manu Pavone et « les Russes ». Mais un garçon qui m’impressionna tout particulièrement (en 89 ?) fut un gaillard qui, à première vue, n’avait pas l’air d’un foudre de guerre dans un T shirt trop grand pour lui, et qui prit un départ plutôt lent, mais qui tint méchamment la cadence quand, vers le 3e kilomètre, nous commençâmes à chercher un second souffle (c’est toujours au 3e kilomètre que ça devient dur…) Le vainqueur de cette année-là avait été recruté par son copain Thierry Gastout. Il est devenu depuis champion francophone de cross-country et s’est classé cette année 6e vétéran au championnat d’Europe de course de montagne. Il s’appelait Alain Vandercammen.

Je me souviens qu’en 88, le jogging du Cœur clôturait le challenge du Borinage, que je menais avec quelques points d’avance sur Mati Hamoumi. Je devais limiter les dégâts pour conserver la tête. Cette année-là, j’ai réalisé ma meilleure performance sur le circuit (48’30) sans pouvoir empêcher mon ami Mati de me prendre suffisamment de secondes pour inverser la hiérarchie. Je me souviens que Pierre Louvrier surnommait Mati « le prince du désert »…

Je me souviens du parcours. Tout de suite après le départ, place du Jonquois, on tourne à gauche dans la rue de la Frontière. On vire une nouvelle fois à gauche quelques centaines de mètres plus loin (attention en cas de gelée au sol !), et l’on se retrouve sur un chemin étroit, asphalté, en légère descente qui nous amène rapidement (souvent trop…) au premier kilomètre. Le peloton serpente dans la belle campagne blidégarienne jusqu’à un virage à droite qui ramène rue de la Frontière aux environs du troisième kilomètre. Ça monte légèrement mais on n’y pense pas trop car les spectateurs du départ ont eu le temps de revenir se placer à la traversée de la rue de la Frontière et nous encouragent follement. On traverse, on prend brièvement le béton de la rue Saussette et on tourne à gauche dans la voie Blanche. On passe devant chez Laurent Denghien et on est bientôt place de Blaugies. On vire à gauche, puis immédiatement à droite vers Erquennes. Vient une courte mais méchante portion pavée que l’on digère sans trop de problèmes : on n’est qu’au quatrième… Quelques centaines de mètres plus loin, on vire à droite vers le château d’eau, dans un chemin de terre généralement peu boueux, assez grossièrement empierré : attention aux chutes ! Ce chemin amène à Erquennes, un village que l’on ne fera qu’apercevoir. Dès la sortie du chemin de terre, on virera de nouveau à gauche sur une nouvelle – et assez longue – portion pavée (si les bas-côtés ne sont pas trop boueux, il est préférable de les emprunter) qui mène à la chapelle Saint-Ghislain, où l’on pourra se ravitailler. On a passé le sixième kilomètre. Commence alors une ligne droite de trois bornes, roulante et asphaltée, mais où le vent souffle presque toujours de face. C’est là qu’il était intéressant d’être dans le bon peloton, par exemple derrière le dos de Raoul Duprez, si on réussissait à le suivre (dans le cas contraire, on se demanderait pour la ixième fois comment ce gars réussissait à déplacer aussi vite ses épaules de déménageur…) Au coron de Blaugies, on tourne à gauche, on passe devant la brasserie « La Moneuse » sans s’arrêter (même si on s’appelle Raoul Duprez) et un nouveau virage serré (attention en cas de gelée blanche…) nous amène dans le bois. C’est la partie bucolique du parcours mais on n’a pas tellement le temps d’apprécier le paysage car on est déjà au dixième kilomètre et les jambes commencent à s’alourdir. Il a forcément plu les jours précédents, le chemin forestier est boueux et couvert de flaques d’eau. On se souvient que le mieux, pour éviter les dérapages, est encore de passer au beau milieu des flaques. À la sortie du bois, on passe devant l’auberge des Aulnes, on tourne à droite dans la rue des Vainqueurs (le futur vainqueur est déjà loin, peut-être même déjà arrivé…), puis à gauche, dans un nouveau chemin de terre. On traverse la rue Planche Cabeille et on se retrouve dans le sentier des Amoureux. C’est un moment bon mais trop court. On sait que l’arrivée est proche. On sait que, la plupart du temps, les places sont faites. On peut goûter l’élasticité du sol, avoir un regard pour le vieux saule brûlé, virer à gauche en profitant de la force centripète. Le berger allemand d’Yvon Brogniez, fatigué d’aboyer, n’aura même pas la force de nous montrer les crocs. À la fin du sentier, on profitera pleinement des acclamations ou des encouragements. On sait qu’il reste le tour du pâté de maison. On sait que la distance à parcourir se compte désormais en centaines de mètres, puis en dizaines, puis en mètres. Déjà, on aperçoit la place du Jonquois, déjà quelqu’un crie un numéro de dossard, le nôtre, et un temps, le nôtre, on arrête le chrono, on accepte une boisson. C’est fini.

On vient de boucler une vraie classique, le Jogging du Cœur, au parcours inchangé depuis trente ans, et c’est si rare qu’on a raison d’en profiter !


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