Le dimanche 14 mai 2017 restera une date importante dans l'histoire de France. À dix heures précises, à Paris, le président nouvellement élu – le plus jeune de la cinquième République – était investi à la magistrature suprême. C'était, pour lui, le départ d'une journée marathon.
Le même jour à la même heure, au centre sportif de la Roquette, à Montignies-sur-Roc, près de trois cents coureurs prenaient le départ d'une course. Quelques secondes plus tard, la plus jeune participante, la petite Laurena Guerez, chutait dans le peloton, risquant de se faire piétiner par d'autres concurrents, mais se relevait bien vite pour boucler près de six kilomètres en moins de trente minutes. Sa chute donnait des sueurs froides à celles et ceux qui l'entouraient, mais sa photo, au passage sous le panneau « Onnezies, pays des Leûs », rassura tout le monde : « Les loups, semble-t-elle dire, même pas peur ! » Elle a bien mérité de faire la Une de cet édito.
Ceci dit, Emmanuel Macron n'était pas le seul, en ce matin de printemps, à recevoir son investiture. Car investir, c'est « mettre en possession d'un droit, d'un pouvoir, d'une dignité ». Chaque matin, la vie nous investit de la dignité d'être humain. Si le fondateur du mouvement « En Marche » accédait ainsi à la présidence de la République, chacun d'entre nous accède chaque jour à la présidence de sa propre vie. Et comment prendre conscience de ce pouvoir mieux qu'en se sentant vivant ?
À 9 h 59, Olivier Motte nous l'avait rappelé, nous invitant à applaudir Laura Louahed, une jeune femme sportive décédée à 27 ans, en décembre 2016, d’une tumeur primitive de la surrénale, après un an de lutte : la vie est fragile, une bonne raison pour ne pas la gaspiller.
C'est sans doute l'une des raisons qui poussent des centaines de fous de la course, le dimanche matin, à torturer leur corps dans les côtes du Haut-Pays : se sentir vivant. Plus que jamais vivant. Et nos organismes, ce dimanche, furent gâtés dès le départ, dans la côte de la Roquette, puis, dès l'entame du deuxième kilomètre, dans ce « chemin montant, sablonneux, malaisé » baptisé « rue du Coron ». Manquait, heureusement, ce soleil qui complète le tableau dans la fable : « Dans un chemin montant, sablonneux, malaisé, Et de tous les côtés au soleil exposé... »
Heureusement, oui, car s'il avait brillé, au lendemain des « saints de glace », il aurait rendu plus pénible l'effort fourni par 15 ou 16° à l'ombre (contre 9° en 2016). Pas chaud ? Non, mais lourd. Et le vent n'arrangeait rien, ni les faux plats. Car le jogging des Leûs est l'une de ces courses apparemment faciles (après 1 km 300, les deux grosses difficultés sont derrière nous), qui nous poussent à adopter un rythme plus rapide que d'habitude, quitte à flirter avec l'imprudence et à le payer ensuite.
C'est ainsi qu'au km 4, l'auteur de ces lignes commençait à se demander s'il n'était pas parti un peu vite quand il vit revenir deux camarades du jogging club de Baudour, Philippe Dubreucq et Francis Dubuisson, qui lui proposèrent de poursuivre en trio. Proposition immédiatement acceptée !
Qu'est-ce que ça facilite la vie, quand on se retrouve dans un groupe où chacun cesse de songer à son propre classement pour se mettre au service des autres ! Merci Francis, merci Philippe, toi qui étais manifestement au-dessus du lot !
Encore fallait-il, pour arriver au km 4, avoir échappé au piège du km 2. Quittant la chaussée Brunehault, nous empruntions en effet, plutôt que le RAVeL, un chemin de terre parallèle à celui-ci, la rue de l'Abreuvoir, avant de rejoindre ledit RAVeL au bout d'une centaine de mètres. Le hic, c'était que la jonction avec le RAVeL s'effectuait, sur la droite, par un étroit passage entre deux arbustes, tandis que, sur la gauche, le chemin de terre – non barré – amenait, à travers champs, directement à l'ancien abreuvoir d'Onnezies, à un kilomètre de l'arrivée ! Moi qui connais le parcours par cœur, j'ai eu un moment d'hésitation. Plusieurs coureurs, devant moi, ont d'abord pris sur la gauche avant de se raviser.
C'est le moment de sortir un « bon conseil de l'oncle Daniel » : l'équipe organisatrice chargée de baliser le parcours et de prévoir l'emplacement des signaleurs devrait repérer le circuit et, à chaque bifurcation possible, penser à tout, et même à l'impensable. En l'occurrence, ce problème aurait été résolu par un fléchage très précis associé à une banderole barrant la route à gauche (comme celle qui, peu avant, interdisait de franchir la petite Honnelle au niveau du petit pont monolithique).
Plusieurs participants à l'épreuve courte (et, dans une moindre mesure, de la longue) se sont ainsi engouffrés – bien involontairement – dans la brèche, ce qui m'incite à ne pas évoquer, pour conclure, les podiums, sujets à caution, des deux épreuves. Ainsi, l'excellent Vincent Cougneau, deuxième du dix à six secondes du vainqueur, me dit avoir fait demi-tour lorsqu'il a réalisé qu'il se fourvoyait, allongeant ainsi la distance parcourue et laissant de l'influx dans l'accélération qu'il réalisa pour revenir dans la course. Qui sait s'il n'aurait pas, sinon, inscrit son nom au palmarès ?
Dommage. Cette nouvelle mésaventure doit inciter à plus de vigilance que jamais les organisateurs des prochaines courses du challenge qui, sinon, pourraient bien se voir retirer... leur investiture !